Salut les Nours' !
À peine arrivé dans le
petit stade de Saint-Médard d’Eyrans, un train a surgi en contre-bas du paysage…
Aussitôt, j’ai eu l’impression d’être dans la petite banlieue de Dublin :
un vieux stade, récemment réhabilité qui doit tout son charme au fait que la
voie ferrée passe sous sa tribune. J’ai commencé à chercher des trèfles à quatre
feuilles : en vain ! Certainement une prémonition, en ce jour de la
sainte Victoire.
Pourtant, nous étions tous
arrivés à l’heure à la gare. Tous les billets étaient poinçonnés. « Nunuche »
alla présenter ses hommages du soir dans les deux vestiaires, en tenue de chef
de gare. Seize voyageurs avaient composté dans
notre wagon qui pouvait certainement en accueillir dix de plus. En face, le compartiment
était bondé ! Nous étions finalement installés bien confortablement dans
le train et le début du match fut plaisant : une première mêlée stable,
une première passe d’Antoine précise à la charnière, une première touche où le
ballon parut aimanté par les mains de Rémi…
Cependant, au moment où
le T.E.R. de 19h46 passa, les « Arruanais » marquèrent leur premier essai,
sans contrainte. Peu de temps après, à 19h54, le T.E.R Langon-Bordeaux sonna le
glas du deuxième essai… Face à ce grand chagrin, l’éponyme Laurent ouvrit le
portillon de la défense adverse pour s’en aller, cinquante mètres plus loin, planter
l’essai de l’espoir. Mais, c’était l’arbre qui cachait la forêt, ou un train
qui en cachait un autre. Nos adversaires reprirent leur train d’enfer : leur train roulait, roulait, roulait, roulait
toujours... À quatre autres reprises, les Nounours furent châtiés par l'activité
des trains express régionaux. Visiblement, nos cheminots étaient forcément en
grève… Non, ils étaient physiquement crevés, comme des wagons plombés d’un train
de marchandise face à la vitesse d’un TGV.
Sur le bord de touche, « Nunuche »
répétait le score pour se convaincre du mauvais augure. Les vieux académiciens tentaient
de trouver les raisons d’un tel déraillement… Les vieux immortels avaient sorti la tête de la locomotive pour
vérifier que tous les voyageurs étaient bien montés : « on n’est pas au complet ! »… « On ne joue jamais le mercredi ! »… « On
entend trop siffler le train ! »…
Même l’arbitre en prit pour son compte :
« mais, ils sont
seize sur le terrain, alors qu’ils devraient être comme nous, avec quinze bras
et quinze pieds ! »…
« En touche, ils n’ont
pas le droit de se détacher de la mêlée ! ». À ce
train de sénateur, on arriva à la première gare sur un score sans appel : six essais à un !
Alors, dans la petite gare de Saint-Médard d’Eyrans, chacun entendit la petite messe du « Cap’tain ». Dans l'espace de la mi-temps, un discours léger et confus bruissait. Sans hausser le ton, le message fut à base de fierté, de vertus du rugby, de fondamentaux à reprendre, de faire ce qu’on sait faire… Évitons de trop nous éloigner de nos soutiens pour mieux pilonner dans l’axe, car à chaque fois qu’on joue au large, on se met en danger : « non sporgerti dalla finestra !». Allez, on y retourne au mastic !
Le tunnel passé, les
poitrines oppressées, la douleur régénératrice, on vit d’autres passagers dans
le compartiment. Ainsi, les voyageurs ursidiens arrivèrent à bon port et à la
bonne heure. On aurait mérité de marquer au moins une fois de plus, mais ce sont
nos hôtes qui le firent à notre place… En nous voyant au bout du quai, l’arbitre
siffla la fermeture des portes.
Comme les trains
démarrent souvent au moment où on s'y attend le moins, les défaites nous
emportent sous l'œil inquiet et impuissant du staff et de l’Académie… En
regardant le train s'éloigner, sur le quai, les académiciens décernaient les
nominations du soir : le « Talent du Match » à Constantin pour sa constance, le
« Tricotin » à Rémi dont la cheville n’avait pas le même magnétisme que ses
mains, et petite dédicace à « Juju »
qui a retiré son casque pour la dernière fois… Je tiens à souligner les
qualités d’abnégation, de résilience et de bravoure qui ont émergées lors de ce
second acte. Même Régis accepta, sans rechigner, les excuses d’un adversaire
qui l’avait retenu par le maillot. Il
est facile de prendre un train, encore faut-il prendre le bon... À croire que
ce n’était pas le bon wagon ! Les trains sont capricieux et certains sont
inaccessibles. Et il ne faut pas croire tout l'temps, qu'avec la SNCF, tout est
possible !
Dans le wagon-restaurant
de l’après-match les « Arruanais » nous ont reçu comme à chaque fois :
copieuses poulardes et chansons à pleine gorge ! Le train-train des
troisièmes mi-temps. Le rugby possède en lui
une vertu spontanée, une dimension pittoresque qui berce les après-match. C’est
là que le rugby puise son esprit de convivialité. Celui qui n’aime pas la «
troisième mi-temps », n’aime pas le rugby !
Le prochain voyage nous amènera dans un autre train...
... et certainement avec plus d’entrain !
Biz -
@+ JYB/K’nar – le 25 mars 2022
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